10 mars 2008

"Journalisme" économique ta mère!

Ami/camarade/lecteur, mon amour (biffez la mention inutile),




Vous inculquer par l'exemple les bienfaits du silence, c'est une chose - mais si je me complais dans l'exercice, vous finissez par croire que je vous abandonne dans ce triste monde livré aux propos féroces des ultralibéraux décérébrés vomissant leur haine sur le citoyen tel l'hydre déversant son haleine empoisonnée sur tout qui s'approchait trop près de son platane à Lerne... Mais déjà je m'égare...

Je m'égare car il s'agit aujourd'hui de parler de cette engeance dont on a peine à croire qu'il existe encore des groupes de presse pour leur donner la parole (ah oui, mais j'oubliais que la presse - contrairement à ce qu'elle clame partout - n'est pas idéologiquement neutre). Je parle bien sur du journaliste économique.

Contrairement à l'évidence, il semblerait que le journaliste économique ne soit pas un monstre velu doté de 15 pattes, 4 gueules et 6 sexes de dimensions diverses mais tous largement inférieurs à la moyenne. Non, en fait, le journaliste économique, ça peut ressembler à ceci:


Bon, d'accord, on est loin de Clark Kent. Mais enfin, on aurait vite fait de se laisser endormir par l'aspect à peu près raisonnable du personnage. On aurait tort.



Par exemple, prenons la "chronique" que ce petit monsieur serine aux auditeurs de classic 21 le matin, quand ils ne sont pas encore bien réveillés, ou le soir, quand ils sont abrutis par une journée de boulot et qu'ils cherchent quelques instants d'un réconfort bien mérité dans les embouteillages en se curant le nez et en se laissant aller à chantonner les refrains anti-capitalistes de Jethro Tull. Et, tant qu'à faire, prenons la chronique du jeudi 6 mars en particulier. J'irai nettoyer mon clavier avec une brosse et du savon après, mais allons-y d'une petite citation:


"Le dernier conclave budgétaire a au moins fait un million de victimes, dont la plupart sont des pensionnés. Pourtant, on en parle peu, trop peu. Je m'explique. Faute d'accord entre les partis politiques, la taxe touchant les plus-values des sicav qui ont au moins 40 % de leurs actifs en obligations n'a pas été modifiée. En fait, cette taxe très controversée avait été décidée vers la fin de 2007, puis on a cru qu'elle serait retirée au début de cette année. Ce n'est pas le cas du tout : elle est toujours là et bien là. "


Alors, petit test, à votre avis, qu'est-ce qui fait bondir le brave plumitif? Le fait que, d'après lui - il ne s'encombre pas de références - ce sont principalement des pensionnés qui sont touchés? Ha, ha, laissez-moi rire. Je ne serais pas surpris de l'entendre proférer un de ces quatre matins que seul un pensionné du pilier privé est un bon pensionné.
Ce n'est pas non plus le fait que, à l'attendre, les types qui ont bouclé le budget 2008 auraient autant de morts sur la conscience qu'un sixième des génocidaires nazis ou les animateurs de la guerre civile congolaise.

Non, regardez mieux. Mais si, là, à la troisième ligne: "taxe touchant les plus-values des Sicav". Incroyable, non? l'Etat se met à taxer les plus values de produits financiers! non mais vous vous rendez-compte? C'est à tomber de sa chaise et à briser sa Rolex. Avec ces dangereux adeptes de la révolution bolivarienne dans le gouvernement, au rythme ou ça va, il faudra bientôt une autorisation du soviet suprème pour boire son pim's sur la place m'as-tu-vu.
Ca mérite bien d'aller dire partout que le petit pensionné est la malheureuse victime de la rage taxatoire. Et de s'offrir un grand écart, puisque le journaleux est contraint de conclure sur le fait que le marché de la sicav n'est pas au beau fixe pour le moment...et que les moins-values sont, quant à elle, défiscalisées.

De se dire que ce sont des radios publiques qui dépensent de l'argent et du temps d'antenne pour laisser déblatérer des insanités pareilles, ça c'est un vrai scandale. Après ça, les amis de Reynders vont encore aller dire que la RTBF est l'organe médiatique des socialistes...


Remarquez que les média publics n'ont pas le monopole des colonnes ouvertes aux zigomars et autres ostrogoths. Prenons "Les Echos", par exemple. Il s'agit d'un titre choisi en référence au phénomène acoustique observé lorsqu'on crie dans l'oreille d'un de leurs collaborateurs et qu'on bouche celle d'en face avec un morceau de toile isolante.

Et bien, toujours le 6 mars, on assiste à un autre grand moment de publication quotidienne sur papier journal. Et là, les mots me manquent. C'est du Zola, du Hugo, les morceaux choisis du Childe Harold de Byron. Une révélation fracassante. IL Y A DES ENTREPRISES PUBLIQUES, AVEC DES PS DANS LES CA, QUI ONT RECOURS AUX INTERETS NOTIONNELS!!

Non? SI!

Alors, ça c'est dingue, ça voudrait dire que ces entreprises dont les fonds proviennent de l'Etat, qui délivrent des missions de services publics, qui ne sont pas supposées dégager de bénéfices et qui réinjecteraient dans le système les éventuels marges utiliseraient aussi ces ficelles fiscales? Quel scandale, ouh! les vilains rouges, à la porte!
Quoi, ces révolutionnaires-avec-le-couteau-entre-les-dents-qu'on-ne-comprend-pas-ce-qu'ils-disent* veulent nous empêcher de recevoir de juteux cadeaux fiscaux qui nous permettent d'augmenter notre bénéfice et donc aussi de rétribuer plus grassement encore nos actionnaires ou au minimum de nous acheter une véranda "quatre saisons" pour placer au dessus de nos 4500m² de piscine au milieu du parc? Et dans le même temps, il admettrait que des entreprises publiques échappent à l'impôt (dont elles tirent leur première source de financement) pour réinjecter de l'argent directement dans les rouages?
Enfin... le papier ne refuse pas l'encre, et tous ces poulpes ne s'en trouvent pas plus mal. Seule information intéressante fournie par ces braves gens: le bénéfice net de Fortis pour 2007 est repassé sous la barre des 4 milliards d'euros. Excusez-moi, je vous laisse pour aller essuyer une larme dans mes vieilles liasses de titres au porteur...
* à ne pas confondre avec José Happart, ça c'est juste un couillon avec le cerveau entre les orteils qu'on ne comprend pas ce qu'il dit non plus.

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