20 mai 2009

Reynders ne connait rien à l'Europe

On va encore dire que je suis méchant et que je ne me réveille que pour taper sur les bleus. Mais franchement, dans une campagne où les coups bas pleuvent, voila quand même quelque chose qui touche enfin à un débat de fond(s). C'est évidemment un dossier fiscal. Voici la dépêche Belga que je viens de recevoir. Pudiquement intitulée "la Commission tempère l'idée d'une amnisitie fiscale européenne", c'est plutôt la douche froide, oui!

BRUXELLES 20/05 (BELGA) = La Commission européenne a tempéré l'idée d'une amnistie fiscale européenne, évoquée mardi par le ministre belge desFinances, Didier Reynders. Cité dans L'Echo, M. Reynders a affirmé "qu'il ne s'opposerait pas à un tel projet de régularisation s'il devait être posé sur la table du Conseil européen parce que cela permettrait de ramener la sérénité dans les débats actuels". Les montants rapatriés permettraient de financer un plan de relance européen, a-t-il argumenté.
Interrogée par l'agence Belga, la Commission européenne a répété mercredi qu'elle n'aurait "rien à voir" avec un tel projet. Une amnistie fiscale tombe dans le champ de la taxation directe, qui n'est pas du ressort des instances communautaires, explique-t-on au cabinet du commissaire à la fiscalité, Laszlo Kovacs. Les pays européens peuvent mettre en oeuvre des amnisties fiscales individuelles, comme l'ont déjà fait la Belgique ou l'Italie, à condition qu'ils respectent certaines règles, notamment la non-discrimination, précise-t-on à la Commission. Ils peuvent aussi se concerter au sein du Conseil des ministres des Finances, mais la mesure ne serait pas proprement communautaire.
Au niveau politique, il serait en outre difficile de trouver un accord sur une telle mesure. Un porte-parole des socialistes européens, interrogé par L'Echo, lâchait ainsi que "Didier Reynders ferait mieux de s'occuper de la répression de la fraude en Belgique plutôt que de défendre l'idée de donner des primes aux fraudeurs en Europe". Le ton est encore plus cinglant chez les socialistes belges. Dans un communiqué diffusé mercredi, le PS a estimé qu'"on pourrait rire (de l'idée d'une amnistie fiscale européenne) si l'état de nos finances publiques n'était à ce point plombé par dix années d'incurie ministérielle aux Finances"./.WAE/(OCH)
Pour synthétiser, qu'est-ce qu'on apprend de ce texte?
1. Qu'en 10 ans de participation au Conseil des Finances, Reynders n'a toujours pas la moindre idée de ce que sont les compétences européennes en matière fiscale. J'espère que l'appareil de son parti est mieux informé que lui parce que sans ça, leur projet européen, ça doit être beau...
2. Que, comme il n'est pas foutu de mettre en place un système de contrôle et de répression de la fraude un tant soit peu efficace, la solution réside pour lui à organiser le blanchissement de la fraude fiscale dans l'Europe entière. Evidemment, ça noie le poisson.
3. Que dans son analyse, le débat sur la fraude fiscale "manque de sérénité"... J'ai sans doute mal compris le message des 150.000 travailleurs européens dans la rue la semaine dernière qui refusent de payer la crise du capitalisme. En fait, ils voulaient tous ramener leurs économies planquées au Liechtenstein.
Ca ne m'arrive pas souvent mais ça me donne envie de paraphraser Kubla. Reynders, c'est un gars chargé de gérer les stocks de confitures. Et ce qu'il propose, c'est de donner le pot aux types pris avec les mains dedans. Pour pouvoir dire demain: "désolé les gars, pénurie de confiote. Aujourd'hui, c'est tout le monde au pain sec et à l'eau sauf pour ceux qui ont amené leur propre pot".
C'est la crise, nom de dieu! La fraude et l'évasion fiscale, c'est 200 milliards d'euros par an qui ne sont pas dépensés dans les services publics, dans l'enseignement, dans les soins de santé! 2% du PIB européen! Et quand les socialistes demandent la transparence bancaire, le démantellement des paradis fiscaux et la réglementation des marchés financiers, tout ce que les libéraux répondent, c'est "euh, oui, ok, mais laissez nous le temps de trouver une solution pour continuer de ne pas payer d'impôt sur ce pognon pas clair". Ca suffit! Les Finances, c'est un ministère sérieux, pas une planque pour nazebroque. Qu'il arrêt ede délirer et qu'il fasse enfin fonctionner un outil important pour maintenir les solidarités entre citoyens. Ou qu'il se barre!

3 commentaires:

Julien Uh a dit…

ben je dois être un des rares à aller encore sur ce blog :-). j'étais 'ailleurs surpris par l'annonce de mon fil rss disant que tu avais écrit, tiens. Bon cela étant, fallait peut-être que le PS n'accepte pas qu'il soit 10 ans aux finances, l'olibrius. Et qu'on conditionne le refinancement de cette administration à autre chose qu'à une pseudo "modernisation" mais à des contrôles de terrain (qui ont presque disparu pour les sociétés)

gilles a dit…

Les "socialistes", après avoir dérégulé et privatisé pendant 30 ans, comme de bons soldat du capitalisme mondial, veulent nous faire croire qu'ils se battent pour la justice fiscale et pour des services publics de qualité.Désolé, mais l'essentiel de l'appareil du parti préfère garder le pouvoir que de défendre la classe ouvrière.Ils n'ont plus aucune crédibilité.

john V. Doe a dit…

C'est vrai qu'il est tentant de mettre dans le même sac les libéraux qui ne font rien en matière de justice fiscale (au contraire) et les socialistes qui laissent faire sous l'alibi d'être ultra-minoritaires dans ce gouvernement-ci. Que n'ont-ils fait qq chose à l'époque de l'alliance rouge-bleue. Ah oui, ce n'était pas encore assez porteur pour mériter de l'attention. Mais quand on voit les places respectives dans les journaux entre des miettes détournées par des pourris de la classe politique et les 2% du PIB détourné par pourris de la classe affaire sans même parler des hold-up des casino de Fortis et C° (pile je gagne, face tu perds), on pourrait comprendre leurs priorités.

A tort, d'ailleurs: si un mensonge suffisament répété devient une vérité, une vérité suffisament répétée devient une priorité, même dans "la presse qui ment" ! Et la justice fiscale, la justice sociale ce sont des priorités à défendre tous les jours à peine de les voir disparaître.